Ce que dit le vandalisme des statues historiques en Europe

Le 10 juin 2020

Le vent de revendications pour davantage de justice raciale parti des Etats-Unis a bel et bien gagné l’Europe où des groupes de protestataires vont jusqu’à abattre les monuments historiques à la gloire de personnages contestés. En Angleterre (photo ci-contre), en Belgique et plus loin, en Martinique, plusieurs statues ont été vandalisées par des manifestants anti-racistes.

Dans un entretien accordé à La Croix, Dominique Taffin, directrice de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage, apporte un éclairage sur ces actes de vandalisme et les remises en cause d’un Histoire jugée trop partiale.  « Ces actions spectaculaires témoignent d’une forme d’exaspération devant des monuments qui reflètent une histoire univoque et mettent à l’honneur des personnalités controversées », commente-t-elle. « La colère des manifestants s’en prend à des hommes dont le rôle est souvent clair-obscur. »

En Martinique, la destruction de la statue de Victor Schloechler a suscité une réaction de regret de la Fondation pour l’abolition de l’esclavage. « Certes il croyait en la colonisation civilisatrice, mais c’est surtout un grand abolitionniste », défend sa directrice.
A l’inverse, elle reconnaît que les manuels d’Histoire font le silence sur la face obscure de grandes personnalités, telles Colbert, homme d’Etat incontesté, mais auteur du Code noir qui institutionnalisait l’esclavage. Le manque de reconnaissance pour les blessures mais aussi les riches apports des peuples autochtones dans l’Histoire de la France devrait être comblé, selon la directrice de la Fondation qui salue la décision du gouvernement français d’ériger un mémorial pour les victimes de l’esclavage au Jardin des Tuileries.

« Pour nous, l’important n’est pas de supprimer des monuments ou de changer le nom des rues mais d’ouvrir le débat, de mettre les choses en perspective. Seul le dialogue aura une vertu pédagogique et permettra l’apaisement plutôt qu’une confrontation violente des mémoires. Tout un travail de dévoilement d’un passé latent doit être effectué», ajoute-t-elle. « Penser l’esclavage amène à s’interroger, par exemple, sur le travail des enfants qui fabriquent certains de nos vêtements dans des pays lointains, mais aussi sur les racines historiques du racisme, aujourd’hui », rappelle Dominique Taffin dont la Fondation entend multiplier les initiatives allant dans le sens d’un travail de mémoire et d’information.

 

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