Parents 1 et 2 : les leçons d’une tentative de neutralisation

Le 20 février 2019

L’Assemblée nationale a adopté le 12 février un amendement qui imposerait à l’Education nationale d’abandonner les mots père et mère dans ses documents destinés aux parents : « Chaque formulaire administratif qui leur est destiné fait mention d’un parent 1 et d’un parent 2. » En raison du caractère règlementaire de la disposition, le gouvernement lui était opposé. Ce vote a le mérite d’éclairer la façon dont le lobby LGBT agit au Parlement. Cinq enseignements sont à tirer.

Un lobby LGBT hyperactif

Malgré ses dénégations, la puissance du lobby LGBT au sein de la LREM est attestée. « Victoire LGBTQI ! » a tweeté après le vote Jennifer de Temmerman, la députée En Marche qui a défendu l’amendement dans l’hémicycle.

Notons qu’elle opte pour deux des rallonges du sigle LGBT. QI pour queeret intersexuels après lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels. D’autres mentions commencent à fleurir : questionnant, asexuel, allié, pansexuel… Ce qui pourrait donner LGBTQIQAAP… Obéissant aux codes de l’idéologie du genre, qui entend troubler les identités masculine et féminine, cette inflation d’étiquettes vise à contester la parité sexuelle dans l’engendrement, principe d’écologie humaine honni.

Quoi qu’il en soit, l’influence du lobby gay et son entrisme en politique n’est plus à démontrer. En pointe à l’Assemblée nationale, Laurence Vanceunebrock-Mialon ne se cache pas d’être une députée militante de la cause en se décrivant comme « ex flic, homosexuelle, maman de deux filles issues de PMA effectuées à l’étranger ». Elle milite à partir de son expérience, marquée par la séparation en 2007 d’une compagne, mère biologique de leur seconde fille. Aujourd’hui, l’élue se pose en victime d’une configuration parentale alambiquée qu’elle a cru pouvoir imposer à des enfants, en transgressant à l’étranger les limites posées par les lois bioéthiques françaises. C’est la technique du fait accompli. On retrouvait Laurence Vanceunebrock-Mialon en première ligne pour demander que son parti sanctionne sa collègue Agnès Thill qui avait dénoncé « un puissant lobby LGBT à l’Assemblée nationale », s’attirant les foudres de Marlène Schiappa et du porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux : « Ce terme de lobby LGBT est absolument inacceptable et n’a pas sa place dans le débat public. » CQFD.

Le couple dans le viseur

Il ne faut pas s’y tromper : cette offensive ne vise pas à conquérir l’institution familiale mais à la dissoudre, en « neutralisant » les parents. L’idée vient de loin. Je l’expose dans mon essai Le Temps de l’Homme (Plon, 2016). Les déconstructeurs ne font pas mystère de leur aversion pour l’altérité homme-femme, la fidélité sexuelle, l’autorité parentale et la monogamie. « Pour abolir le mariage, il faut d’abord que tout le monde puisse en bénéficier » affirmait dans un colloque de 2013 l’avocate Caroline Mécary, également hostile à l’engagement de fidélité inclus dans le mariage civil. Dans son tout dernier entretien au Monde, dès 2004, Jacques Derrida affirmait à Jean Birnbaum : « Si j’étais législateur, je proposerais tout simplement la disparition du mot et du concept de “mariage“ dans un code civil et laïque. Le “mariage“, valeur religieuse, sacrale, hétérosexuelle — avec vœu de procréation, de fidélité éternelle, etc. —, c’est une concession de l’État laïque à l’Église chrétienne — en particulier dans son monogamisme qui n’est ni juif […] ni, cela on le sait bien, musulman. En supprimant le mot et le concept de “mariage“, […] on les remplacerait par une “union civile“ contractuelle, […] entre des partenaires de sexe ou de nombre non imposé. »

Derrière les notions administratives kafkaïennes de parent 1 et parent 2, c’est bien la polygamie, le polyamour et finalement la société liquide, décrite par le sociologue Zygmunt Bauman, qui se profilent. En cas de recomposition familiale, à partir du moment où l’on sort de la dualité homme-femme, ou père-mère, rien n’empêche d’ajouter des numéros 3 ou 4 etc. Les systèmes de coparentalité que certains imposent aux enfants introduisent souvent d’emblée quatre adultes qui prévoient de se partager une perspective de garde alternée, au détriment de l’enfant.

Le mépris de la famille « traditionnelle »

Dans sa défense de l’amendement dans l’hémicycle, la même Jennifer de Temmerman a fustigé les formulaires proposant aux parents des « cases figées dans des modèles sociaux et familiaux un peu dépassés » qui excluent, à ses yeux, certains parents « par des schémas de pensée un peu arriérés ». Or, personne n’a pensé aux orphelins que les anciens formulaires devraient blesser tout autant que les enfants auxquels on a fait croire qu’ils ont deux mamans ou deux papas. Par ailleurs, la plupart des enfants élevés par deux hommes ou deux femmes ont un père et une mère. Et sont en droit de les connaître. Ni l’immense majorité des 13,7 millions d’enfants qui ont la chance de vivre avec leurs deux parents (71% du total), ni les 3,5 millions qui vivent avec un seul de leurs parents — surtout leur mère — ne se retrouveraient dans les dénominations parent 1, parent 2.

Seul un sentiment de domination culturelle peut autoriser une minorité à afficher son mépris pour des mœurs majoritaires. Le compte Twitter officiel des « LGBTI de La République en Marche », qui a salué en toute logique le vote de l’amendement « parent 1 parent 2 », a produit le 6 février 2019 deux tweets significatifs. Il affirme que, selon une étude, « Les enfants de couples de même sexe sont 6,7% plus susceptibles d’obtenir leur diplôme que les enfants de couples de sexe différent » puisqu’ils « sont généralement plus heureux et en meilleure santé que les autres, peut-être parce que ces couples partagent plus équitablement les responsabilités parentales et les tâches domestiques ». Si ces enfants sont si favorisés, pourquoi s’acharner à se plaindre de leur sort ? Les gays du parti dominant — dont le compte affiche moins de 1.600 abonnés — affichent leur mépris de caste pour les familles qui honorent la parité homme-femme.

Sexe, mensonge et agitprop

L’amendement parent 1, parent 2 s’inscrit dans une agitprop typique. On choque l’opinion, on la secoue à dessein, en considérant que les choses retomberont dans le sens de la pente glissante. Ainsi s’explique que soit défendu un texte qui bafoue à l’évidence la répartition entre les domaines réglementaires et législatifs. Valérie Petit, qui le présentait à l’Assemblée nationale, riait en privé le soir même du « bordel » qu’elle avait provoqué, tout en s’en défendant en public. Jean-Luc Romero, autre activiste de la « cause homosexuelle » avoue désormais avoir menti en public et ri en privé, à l’époque du PaCS, sur les intentions réelles de ses promoteurs. Tous les moyens sont permis pour « faire avancer l’égalité ». Un tweet publié par l’élu d’Île-de-France en 2013 mérite d’être archivé. Jean-Luc Romero vient de l’effacer : « Qu’on cesse de dire que père et mère seront remplacés par parent 1 et parent 2. C’est totalement faux. »

Un mensonge avoué ou dévoilé, c’est l’arbre qui révèle la forêt des contrevérités. Tout le système qui tente de légitimer la notion d’homoparentalité est biaisé, faux, mensonger. La conviction de subir une « discrimination procréative » du fait de son orientation sexuelle a beau être sincère – et même poignante – elle n’en est pas moins abusive, et pernicieuse. La dictature victimaire des ultra-minorités vise à casser le modèle social dominant, qui est jalousé alors qu’il bénéficie encore à l’immense majorité des enfants. On se moque de l’opinion. Mieux vaut le savoir. Pendant les états généraux de la bioéthique, nous avions dénoncé les questionnaires de plusieurs espaces éthiques régionaux qui proposaient, aux côtés des cases « masculin » et « féminin », de s’attribuer un sexe « neutre ». En toute illégalité.

Une faute d’impatience ?

Toute la difficulté du lobby LGBT etc., c’est de ne pas aller trop loin trop vite. Là, il a peut-être fauté par excès d’arrogance. Ces numérotations des parents sont en effet absurdes. Autant les enfants sont classables — et non pas hiérarchisables — selon leur ordre d’arrivée dans la famille, autant les deux « partenaires » d’un couple ne peuvent pas consentir à être numérotés 1 ou 2. Certains notent le machisme qui prévaudrait si le père était n°1. Et sa déresponsabilisation s’ils s’attribuait le n°2. D’autres soulignent que, dans une configuration à deux femmes ou deux hommes, le numéro risque d’attester une vraie hiérarchie entre les parents. Le « géniteur » risque d’être le numéro 1. Le numéro 2 serait alors un parent de second rang, ce qui n’est pas loin de correspondre à la réalité. D’où la réticence affichée par le président de l’association de familles « homoparentales » : Alexandre Urwicz voit dans la numérotation des parents le risque d’une « hiérarchie parentale ». Et ce n’est pas le moindre enseignement de cette controverse que de faire ressortir que la prétendue homoparentalité implique en elle-même une hiérarchisation des parents, selon qu’ils ont ou pas un lien biologique avec l’enfant. Chassez le naturel…

Devant la levée de boucliers générée par l’amendement controversé, il devrait disparaître dans la suite du processus parlementaire. Anne-Christine Lang, co-rapporteur du projet de loi « pour une école de la confiance » entend proposer des « mentions à entourer ». Mais cet épisode aura eu le mérite de confirmer que, pour imposer son agenda, le lobby LGBT table sur l’accoutumance des Français à sa politique des petits pas. Et ce, avec la complicité du gouvernement actuel qui tente encore de faire croire que PMA « pour toutes » et GPA « pour tous » sont séparées, alors qu’elles s’inscrivent dans la même logique de déconstruction. Pour déjouer le procès en homophobie fait aux personnes qui privilégient l’intérêt supérieur de l’enfant contre les revendications LGBT, rappelons que ce lobby ne doit pas être amalgamé à la majorité des personnes homosexuelles. Beaucoup estiment que leur orientation ne légitime en rien qu’on prive un enfant de la parité homme-femme, principale richesse de l’humanité. SOS-homophobie amalgame à sa lutte légitime contre la haine et les discriminations injustes, la promotion de la prétendue « PMA pour toutes » dont elle taxe tous les adversaires d’homophobes : non seulement elle classe injustement une majorité de Français dans cette catégorie fourre-tout, mais encore elle génère de l’homophobie chez les Français ; ces derniers risquent en effet d’assimiler homosexualité et mépris de l’intérêt des enfants.

Face à un lobby libertaire qui entend transformer tout désir en droit, sans considérer le droit des plus faibles, il faut savoir poser des limites ferme. La menace d’une neutralisation des genres et d’une dissolution de l’altérité homme-femme mérite que la majorité de bon sens s’engage dans une résistance tenace. Il n’y a aucune raison de se laisser intimider par des groupes qui font passer leur idéologie avant la protection des plus fragiles.

Tugdual Derville, Délégué général d’Alliance Vita

Source : Aleteia

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