Fils et petit-fils de pasteurs, Adolphe Monod est né dans une famille aisée et nombreuse, qui aura de nombreux descendants jusqu’au vingtième siècle : Jérôme Monod et Jean-Luc Godard sont des arrière-petits-fils d’Adolphe, Théodore Monod, Jacques Monod et Jean-Noël Jeanneney trois de ses arrière-petits-neveux ! Deux de ses frères seront aussi pasteurs : Frédéric, l’aîné de la fratrie de 13 enfants, et Guillaume, qui n’a que 2 ans de plus que lui et dont il sera toujours très proche.
« Conversion à la façon de Saül »
Très jeune, il ressent une vocation pastorale et suivra alors des études de théologie à l’Académie de Genève, jadis fondée par Calvin. En 1824, il sera consacré pasteur mais ce n’est qu’en 1827, lors d’un séjour à Naples, qu’il connaîtra une expérience de conversion décisive ; comme le dit l’auteur, qui a fait une thèse en théologie sur Monod à Montpellier, « cette ‘conversion’ à la façon de Saül, crise psychologique qui l’amène à ressentir un sentiment de délivrance, de paix intérieure, grâce à l’action du Saint-Esprit est l’expérience-type de conversion du Réveil ». Monod se sentira désormais très proche du courant évangélique de l’Église réformée et ne cessera plus de critiquer, parfois violemment, le courant libéral qui y était dominant. C’est d’ailleurs ce qui lui vaudra d’être destitué au bout de quatre ans (1827-1831) de sa charge de pasteur au Temple du Change à Lyon par le consistoire qui ne supportait plus ses sermons très énergiques pressant à une conversion radicale.
Excellent orateur
Alors, durant les quatre années suivantes (1832-1836), il sera un des premiers pasteurs de l’Église évangélique de Lyon. Pourtant, il reviendra vite dans le giron de l’Église officielle qu’il refusera ensuite toujours de quitter, à la différence de son frère Frédéric (auquel il s’opposera) qui sera un des fondateurs des Églises évangéliques libres en France.
Adolphe, lui, sera durant une dizaine d’années (1836-1847) professeur à la faculté de théologie de Montauban (qui sera transférée à Montpellier en 1919) où il enseignera successivement la morale, l’hébreu et le Nouveau Testament. Il finira sa courte carrière comme pasteur (1847-1856), toujours dans l’Église établie, où il critiquera le Réveil, ce qui, comme l’indique le sous-titre de notre ouvrage, fera de lui un ‘artisan paradoxal’ de ce dernier puisqu’il l’a fortement influencé sans avoir jamais voulu y adhérer formellement et il n’a jamais hésité à en dénoncer les dérives, ou tout au moins ce qui apparaissait tel à ses yeux.
Très connu en France de son vivant, surtout pour ses sermons qu’il préparait avec grand soin (et il était aussi un excellent orateur !), il l’est beaucoup moins aujourd’hui mais il semble qu’il y ait depuis peu un regain d’intérêt pour cette forte figure du protestantisme français moderne et, sans nul doute, ce livre, bien écrit, à la lecture agréable, devrait y contribuer pour sa part !
David Roure
Adolphe Monod (1802-1856). Un artisan paradoxal du Réveil protestant français, d’Étienne Tissot,
Olivétan, collection « Figures protestantes », 2018, 200 p., 16 €
Source : La Croix
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