Pour un certain nombre d’évangéliques, la Réforme ne semble pas vraiment avoir d’importance. La grande affaire, ce seraient les renouveaux du 18e siècle et l’explosion pentecôtiste. La Réforme fut cependant prodigieuse. Mais n’était-ce que l’héroïsme remarquable de Luther et de ses 95 thèses ? L’influence brillante et éphémère d’hommes exceptionnels ? Luther ne pouvait pas connaître la portée de son geste. Il a agi d’après sa seule conscience et non à la manière d’un politicien calculant ses effets. Ce qu’il voulait, c’était « Christ seul », prêchant l’Évangile et la liberté de conscience.
Changement radical
Or il y a eu une autre Réforme : le mouvement populaire. Comme le décrit l’historien Diarmaid MacCulloch : « La Réforme n’aurait pas eu lieu si des gens ordinaires n’avaient pas été convaincus qu’ils étaient les acteurs du plan universel voulu par Dieu, et qu’au sein de la Bible, Dieu leur avait laissé le livret de ses plans et instructions, ainsi que la manière de les suivre. » Cette Réforme populaire a engendré une formidable diversité dans la manière d’adorer et de louer Dieu. Les Réformateurs dénoncèrent l’idolâtrie et les faux cultes, et les remplacèrent par la prédication biblique.
De nouvelles traductions de la Bible dans les différentes langues parlées sont venues soutenir le mouvement, encourageant ainsi l’écriture de cantiques tirés des Psaumes ou encore l’étude de la Bible. Ces Réformateurs, on l’a souvent oublié, étaient cependant l’incroyable manœuvre du Saint-Esprit, à travers les frontières nationales et les classes sociales, des princes aux paysans. En fait, les Réformateurs étaient et restent l’œuvre majeure du Saint- Esprit depuis les temps apostoliques. Si les idées des Réformateurs étaient bibliques et puissamment performantes, les idées seules ne peuvent expliquer les myriades de personnes ramenées au Royaume de Dieu par la régénération et la foi.
Déjà, dans les premiers chapitres de son Institution (I.6,7), Calvin insistait sur le fait que même la Parole inspirée de Dieu peut se révéler insuffisante pour ouvrir les yeux des hommes pécheurs et changer leurs comportements coupables, si elle n’est accompagnée de l’œuvre du Saint-Esprit dans les cœurs.
L’œuvre du Saint-Esprit
Le dernier chapitre de Calvin sur la foi est précédé par une présentation de l’action cachée du Saint-Esprit (III.1,2). L’Esprit est celui qui nous unit avec Christ, fait germer en nous la foi et, par la vérité de l’Évangile, éclaire et change nos esprits humains. Le succès de la Réforme ne peut donc pas être attribué au fait que les réformés étaient des théologiens exceptionnels. Ce ne peut être que le résultat de l’action immédiate et invisible du Saint-Esprit.
La Réforme indique que c’est le Dieu trinitaire qui la réalise. Il l’a accomplie dans le passé et il peut le faire à nouveau à l’avenir – quand, où et de la manière dont il le souhaite – avant le retour glorieux de notre Seigneur Jésus. Peut-être que cela ne se passera pas en Europe, mais dans d’autres endroits dans le monde, peut-être même sur le terrain auquel on s’attend le moins !
Paul WELLS
Théologien, professeur émérite de la Faculté Jean Calvin d’Aix-en-Provence
Source : Le Christianisme Aujourd’hui
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