Les interventions du président de la République et du ministère de l’intérieur, à quelques jours du changement de présidence du CFCM et de l’arrivée à sa tête d’Ahmet Ogras, réputé proche de l’AKP et du président turc Recep Tayyip Erdogan, étaient très attendues.
Consolider l’organisation de l’islam en France
Pour l’heure, c’est uniquement comme candidat qu’Emmanuel Macron s’est exprimé sur le CFCM, recevant son bureau le 19 avril 2017. Il avait alors « réaffirmé son attachement à une laïcité qui garantit la liberté de croire ou de ne pas croire, et qui protège le libre exercice du culte dans le respect des lois de la République ». Il s’était dit aussi « hostile à une extension de la loi sur les signes religieux à l’espace public ou à l’université » et avait « souligné la nécessité d’éviter toute « hystérisation » du débat sur ces questions ».
« Concernant l’organisation du culte musulman, Emmanuel Macron s’est félicité de l’action du CFCM, partenaire et interlocuteur privilégié des pouvoirs publics. Il a souligné la nécessité de consolider l’organisation de l’islam en France, loin de toute approche concordataire. Il s’est dit favorable à l’amélioration de la formation des imams en France et pour la mise en place des mécanismes de financement du culte musulman par ses propres ressources », indiquait enfin le communiqué du CFCM.
En s’adressant aux responsables du culte musulman dans un contexte marqué par les attentats terroristes commis au nom de l’islam, le président de la République a « deux options », estime une source. « Il peut les encourager, leur dire « on est là pour vous aider ». Il peut aussi leur dire : « vous dites que vous avez la légitimité pour gérer le culte musulman, prouvez-le » ».
Formation des imams sur le sol français
Invité par la Grande mosquée de Lyon le 15 juin, le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, a lui aussi rappelé « qu’il incombe à l’État d’assurer à chaque citoyen, la possibilité d’exercer son culte sans autre restriction que le respect de l’ordre républicain » et qu’« une telle mission suppose d’abord d’assurer la sécurité de l’ensemble des lieux de culte », et d’« agir pour en améliorer les conditions matérielles ».
Le ministre de l’intérieur et des cultes s’est dit aussi « convaincu que la puissance publique doit susciter le développement de formations d’imams sur le sol français » : « Il ne s’agit évidemment pas de s’immiscer dans les questions théologiques, ce qui n’est pas le rôle d’un État laïc. Mais de favoriser toutes les initiatives pour faire en sorte que les imams qui prêchent dans les mosquées françaises, prêchent un islam en tout point compatible avec la République ».
Prenant l’exemple des rencontres réunissant les différentes religions à Lyon, Gérard Collomb a également insisté sur la nécessité de « construire une société apaisée », en « luttant contre les amalgames ».
« Aujourd’hui, en France, on assimile trop souvent encore l’islam à la haine de ceux qui, bafouant cette religion, commettent le pire », a-t-il regretté. « Pour combattre un tel phénomène, il faut lutter énergiquement contre l’islam radical. C’est l’affaire du gouvernement, qui prend en la matière des mesures fortes avec la possibilité de fermer des lieux de culte, de dissoudre des associations, où seraient employés des propos haineux. C’est l’affaire de la communauté musulmane, qui, comme vous le faites ici à Lyon, se mobilise de plus en plus sur ce sujet. C’est l’affaire de toutes les communautés religieuses, mais plus largement de tous les Français ».
Monter les communautés les unes contre les autres
Cet iftar, organisé dans les prestigieux Salons Hoche à Paris, est financé par deux fédérations musulmanes : le Rassemblement des musulmans de France (proche du Maroc), dirigé par l’actuel président Anouar Kbibech, et la Confédération islamique Milli Gorüs (proche des Frères musulmans).
Dans un communiqué publié à la veille de cet événement, le Conseil français du culte musulman a condamné « avec la plus grande vigueur (l’)attentat lâche et barbare qui a visé délibérément des fidèles musulmans à leur sortie de la prière en plein mois sacré du Ramadan » à Londres. Et exhorté ses « concitoyens de France et d’Europe à redoubler de vigilance et à ne pas tomber dans le piège (…) tendu par les groupuscules terroristes qui visent à monter les communautés les unes contre les autres ».
L’an dernier, à la même époque, le ministre de l’intérieur et des cultes, Bernard Cazeneuve, avait partagé cet « iftar » avec le Conseil français du culte musulman. Après une minute de silence dédiée au couple de policiers qui venait d’être assassiné chez lui par un djihadiste se réclamant de l’État islamique, il avait répondu fermement à son président, et au-delà à l’ensemble des responsables musulmans, qui rapprochent terrorisme et actes anti-musulmans.
Source : La Croix
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