Entre islamisme, islamophobie et islamofolie

Le 4 août 2015

Il est bien connu dans les milieux évangéliques pour ses spectacles et son humour. Avec son dernier livre, le pasteur Saïd change de registre. Il adresse une interpellation au milieu évangélique et questionne son attitude craintive face à l’islam et aux musulmans. Ce « pasteur des banlieues » françaises invite aussi à remettre témoignage et dialogue, même vif, au cœur de rencontres à faire.

Le pasteur Saïd vient de publier une lettre ouverte à propos de L’islamisme, l’islamophobie, l’islamofolie. Sur 120 pages qu’il adresse aux pasteurs, aux imams et à ses amis, il invite les évangéliques, suite à la tuerie de Charlie Hebdo, à se réveiller face à l’islam. Pour lui, les évangéliques font preuve de frilosité et méritent deux reproches. D’un côté, ils nourrissent la peur ambiante par rapport à l’islam – l’« islamofolie » comme le pasteur Saïd l’appelle (p. 42) – et, de l’autre, ils se sont repliés dans leur ghetto et négligent une présence publique auprès des musulmans.

Confiance en Dieu et regard critique
A l’exemple du Christ face aux religieux de son temps, ce pasteur d’origine franco-maghrébine invite à une double attitude. Il s’agit de mettre sa confiance en Dieu par rapport aux défis que représentent l’islam et l’islamisme aujourd’hui. Il s’agit aussi de poser un regard critique sur une religion qui « doit se regarder dans le miroir » et accepter que « les germes de la violence sont dans l’islam lui-même ». A son avis, pour sortir de ce cycle infernal de la violence, les Etats occidentaux doivent « encourager les musulmans à une réappropriation critique du Coran, plutôt que de les exonérer de toute responsabilité dans le terrorisme et de les encourager ainsi dans leurs dérobades et leur discours victimaire » (p. 25).
Après trois chapitres consacrés à la radicalisation islamiste de jeunes dans nos sociétés, à la séduction que peut représenter l’islam pour de jeunes évangéliques et aux projets conjugaux que pourraient nourrir certains au contact de musulmans, le pasteur Saïd plaide différentes pistes à poursuivre ces prochaines années dans les Eglises évangéliques.

Rechercher le contact
Parmi celles-ci, il y a notamment la recherche du contact avec les musulmans dans l’esprit du Christ afin de favoriser le vivre ensemble. Au travers de quelques anecdotes tirées de son expérience de terrain, le pasteur Saïd souligne que de belles rencontres sont possibles dans le respect, la paix et l’amitié. « Il y a un terrain d’exercice fascinant pour la non-violence et le pardon, souligne-t-il, dans le rapport des chrétiens avec la population arabo-musulmane. »
La deuxième piste que propose le pasteur Saïd, c’est la formation. « Si on ne forme pas les chrétiens, si on n’élève pas le niveau en matière de témoignage au quotidien, si on n’apprend pas à nos ouailles à partager l’Evangile, à connaître certains codes culturels et cultuels, notre avenir est en jeu » (p. 110).

Refuser toute « criminalisation » du témoignage
Piste suivante : pour le pasteur Saïd, les chrétiens doivent se révolter contre toute forme de « criminalisation » du témoigne chrétien à l’endroit des musulmans. « L’islamisme fournit des excuses aux ennemis de la foi chrétienne pour verrouiller toujours plus leur liberté d’expression. (…) Il faut donc que les chrétiens se révoltent contre ce climat actuel qui leur fait courber la tête… Pour ce faire, ils doivent s’engager pas nécessairement dans la politique politicienne (…) mais citoyenne et publique, simplement » (p. 110-111).
Lettre à propos de l’islamisme, l’islamophobie, l’islamofolieLe pasteur Saïd poursuit sa lettre ouverte en invitant les chrétiens évangéliques à témoigner de leur foi en Jésus-Christ auprès des musulmans et à en être fiers. La dernière piste vise à encourager le dialogue avec les responsables musulmans, en n’éludant pas les questions difficiles comme : l’islam est-il une religion ou un totalitarisme théocratique ? Que font les sociétés musulmanes de l’égalité civile entre musulmans et non-musulmans ? Quelle place l’islam laisse-t-il à la conversion libre à une autre religion ? Quelle réciprocité existe-t-il par rapport au respect des minorités entre les pays musulmans et occidentaux ?
La lettre du pasteur Saïd se conclut par un retour à la dynamique de rencontres tous azimuts dont témoigne la vie de Jésus de Nazareth. « La clé, c’est la rencontre, martèle-t-il. Elle sera la clé de notre succès. C’est tout. »
Serge Carrel

Pasteur Saïd, « Lettre à propos de l’islamisme, l’islamophobie, l’islamofolie« , 2015, 132 p.

Un autre article à propos du pasteur Saïd sur lafree.ch : « Pasteur Saïd, trois mois après la tuerie de Charlie Hebdo ».

Source : Lafree.ch

 

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