ONU : vers la fin de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme ?

Le 13 novembre 2017

Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies, chargé de veiller au respect du Pacte international sur les droits civils et politiques de 1966, s’est réuni à Genève, les 1er et 2 novembre, pour rédiger son interprétation officielle du droit à la vie. Cette interprétation, appelée Observation générale, a une grande autorité sur les juridictions et les législateurs du monde entier car ce Comité a aussi le pouvoir de juger les États quant à leur respect de ce traité.

Le Comité des droits de l’homme de l’ONU veut-il enterrer la Déclaration universelle des Droits de l’Homme ? C’est la question que l’on peut se poser à la lecture de son projet d’observation générale sur le droit à la vie.

Le Comité des droits de l’homme est chargé du contrôle de l’application du Pacte relatif aux droits civils et politiques, traité qui met en œuvre la Déclaration universelle des droits de l’homme. Le Comité publie régulièrement des observations générales, qui constituent des guides d’interprétation officielle du texte.

Une remise en cause des fondements du droit

Le Comité discute en ce moment une nouvelle observation générale sur l’article 6 du Pacte, selon lequel : « Le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie ».

Or, après avoir rappelé qu’il « s’agit du droit suprême auquel aucune dérogation n’est autorisée, même dans les situations de conflit armé et autres situations de danger public exceptionnel », le projet énonce deux paragraphes incitant, voire obligeant, les Etats à légaliser l’avortement et l’euthanasie, comme s’il s’agissait de droits au titre de l’article 6[1].

Ceci est évidemment contraire à l’intention des auteurs de la Déclaration universelle et du Pacte. Avortement et euthanasie, qui avaient été pratiqués à grande échelle par les nazis, étaient reconnus comme des crimes en 1948, et c’est l’Union soviétique, qui pratiquait également l’avortement, qui a empêché que les enfants à naître soient expressément protégés.

C’est également contraire au droit international. Aucun traité international ne considère l’avortement comme un droit, au contraire, les Etats se sont engagés à prévenir l’avortement, or on ne prévient pas l’exercice d’un droit. La Cour européenne des droits de l’homme n’a jamais reconnu l’avortement comme un droit au titre de la Convention et a toujours considéré la protection de l’enfant à naître comme un intérêt à prendre en considération, tandis que la Cour de justice de l’Union européenne reconnaît que l’embryon est revêtu de dignité humaine dès le moment de la conception car la vie humaine est un continuum à partir de la fécondation.

Quant à l’euthanasie, elle ne peut être considérée ni comme un droit du patient, ni comme un droit du médecin. En effet, comme l’a dit la Cour européenne des droits de l’homme, le droit à la vie ne saurait sans distorsion de langage être interprété comme conférant un droit de mourir. D’autre part, nul ne peut donner intentionnellement la mort à autrui, et ce principe constitue le fondement de la déontologie médicale.

Des positions intenables

L’interprétation envisagée par la Comité rendrait l’Observation générale contradictoire : comment soutenir que le droit à la vie est fondamental et qu’il doit être activement protégé si l’on admet que des personnes peuvent mettre fin à la vie d’autrui hors des cas prévus par le Pacte ? Cette incohérence minerait la crédibilité du texte, et finalement l’autorité du Comité.

Considérer que l’on a le droit de mettre fin à la vie d’un enfant à naître ou d’une personne malade ou âgée signifierait qu’ils ne bénéficieraient pas des droits qui « découlent de la dignité inhérente à la personne humaine », comme l’affirme le Pacte.

Cela signifierait que le droit à la vie ne serait plus « inhérent à la personne humaine », comme le dit l’article 6, mais dépendrait de critères subjectifs comme le désir d’autrui ou l’appréciation de l’intéressé, de son entourage ou de la société sur la valeur de sa vie, en fonction de sa qualité de vie ou de son degré de participation à la vie sociale.

Cela signifierait encore que la dignité, dont découlent les droits de l’homme, ne serait plus « inhérente à tous les membres de la famille humaine », selon les termes de la Déclaration universelle, mais relative et soumise à la décision plus ou moins arbitraire d’autrui.

En d’autres termes, si le projet d’observation générale était adopté en l’état, cela signifierait que le Comité des droits de l’homme abandonne le principe fondamental de la protection des droits de l’homme, l’égale dignité inhérente à tous les êtres humains dont découlent les droits de l’homme. Cela saperait tout l’édifice de protection des droits de l’homme construit depuis la Seconde Guerre mondiale en réaction contre la barbarie nazie…

Claire de La Hougue, docteur en droit

[1] Paragraphes 9 et 10 du projet, disponible sur le site du Comité des droits de l’homme : http://www.ohchr.org/Documents/HRBodies/CCPR/GCArticle6/GCArticle6_FR.pdf

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Source : Généthique

 

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